Le 14 octobre 1066, Guillaume le Conquérant, Duc de Normandie, écrasait l’armée anglo-saxonne et le roi Harold à Hastings et s’emparait de la couronne d’Angleterre. Comment et pourquoi un duc normand a-t-il décidé et réussi une telle prouesse ?
Guillaume, 7ème duc de Normandie, est un descendant direct de Rollon, qui fut le fondateur du duché normand en 911. Cette année là, Charles III, roi de France, concéda à Rollon, chef des Normands le territoire du pays de Caux en échange de l’arrêt des incursions vikings dans son royaume.
C’est en 1035, à l’âge de huit ans, que Guillaume, prend le titre de son père, Robert le Magnifique, mort pendant le retour d’un voyage en Terre-Sainte. Durant les 30 années qui suivent, Guillaume ne cesse de combattre les petits seigneurs de son duché et ramène l’unité dans son domaine. Les relations avec le royaume anglais sont bonnes. En 1042, son cousin, Edouard le Confesseur, recoiffe la couronne d’Angleterre, tombée aux mains des danois pendant 26 ans. En 1051, il désigne même Guillaume comme son successeur.
Harold, fils de Godwin, Duc de Wessex, n’a pas la moindre chance d’accéder un jour à la couronne, pourtant, lorsque Edouard le Confesseur désigne le duc de Normandie comme son successeur, la rivalité entre l’aristocratie anglo-saxonne et normande prend une telle ampleur que deux clans se forment. D’un coté, les normands, qui approuvent le choix d’Edouard, de l’autre, les angles, les saxons et les danois qui veulent tout simplement replacer la couronne dans leur lignée. Godwin propose ainsi son fils Harold pour la succession. En 1052, Godwin dut envoyer deux otages à la cour normande en gage de sa parole d’accepter le choix d’Edouard.
Harald Hardrada, roi de Norvège, est lui aussi un prétendant au trône d’Angleterre, mais il se range au choix d’Edouard, de même que Edgar Aetheling cousin d’Edouard et de Guillaume.
La trahison
Le 5 janvier 1066, Edouard le Confesseur meure, le lendemain, Harold se fait couronner roi d’Angleterre. Cette nouvelle surprend tous les seigneurs d’occident et particulièrement Guillaume a qui revenait le royaume et Harald Hardrada. Le Duc de Normandie prépare dès lors une impressionnante expédition militaire.
Pendant les sept premier mois de l’année 1066, Guillaume dut convaincre les chevaliers et seigneurs normands du bien fondé de l’expédition. Il rassembla également des volontaires de Bretagne, de Flandre, de Bourgogne et d’Italie, réquisitionna ou fit construire près de 1000 bateaux. parallèlement à ces préparatifs d’invasion, il jouait sa carte diplomatique. Il fit plaider sa cause auprès du pape Alexandre II et reçut son soutient officiel, s’assura de la neutralité de Sven Estrithsen, cousin d’Harold et enfin contacta Harald Hastrada. Avec le roi de Norvège, il s’entendit sur une action commune et un partage des terres anglaises. Harald débarquerait au nord, près de York pendant que lui prendrait pied sur la côte sud. Le 1er août 1066, les troupes de Guillaume étaient prêtes et attendaient l’ordre d’embarquement dans la baie de la Somme.
On ne sait pas exactement se qui se passe entre le 1er août et le 28 septembre, date du départ des armées normandes. Les chroniqueurs de l’époque racontent que l’embarquement fut retardé sous prétexte que les côtes n’étaient pas balayées par des vents favorables. Il semblerait plus judicieux, aujourd’hui, de penser à une stratégie étonnante de la part du Duc Guillaume. Ayant connaissance de l’importante armée anglo-saxonne qui l’attendait dans le sud, il savait qu’un débarque serait à coup sur un échec. Aussi, il patienta, attendant qu’Harold licencie son armée pour l’hiver et qu’Harald Hardrada attaque en premier. Et il vu juste.
Intrépides vikings, Harald et ces hommes traversent la Mer du Nord et débarquent près de York le 18 septembre. Le roi Harold réorganise rapidement son armée et part sur le champs repousser les norvégiens.
La bataille
Alerté par ces espions du débarquement des norvégiens, Guillaume préparent l’embarquement de ces troupes. Le 25 septembre 1066, Harold et son armée surprennent les vikings près de York et les écrasent. Dans la bataille, le roi Harald Hardrada meure.
Ignorant cette grande défaite, Guillaume débarque sur les côtes anglaise près de Hastings, le 28 septembre. Il sait que l’armée anglaise partit vers le nord est à plus de 350 km, ce qui lui laisse tout le temps de prendre position. A Hastings, il fait édifier une motte sur laquelle il place un fort en bois et creuser de profonds fossés. Fort qu’il avait amené en pièces détachée depuis le continent. Les troupes d’Harold, fatiguées, reprennent la route vers le sud pour affronter les normands. Guillaume apprend la cuisante défaite de son allié, mais pense tout de suite à ce qu’il en gagne. Son accord avec Harald n’est plus et Harold est affaibli. Le Duc savait que s’il voulait l’emporter, il devrait affronter rapidement son adversaire. Il fallait le contraindre à attaquer.
Surpris par l’arrivée d’Harold dans la nuit du 13 au 14 octobre, il réussit à empêcher un désastre grâce à son service de renseignement et à la discipline de ces troupes. Voulant pousser les anglo-saxons à la bataille, il les laisse occuper les hauteurs de Senlac et prend position au pied de la colline. Les dernières négociations n’aboutissent pas. Harold refusant les propositions de Guillaume.
Les stratégies des deux camps sont bien différentes. Sur la colline, l’armée d’Harold, est composée de huit mille fantassins. Au centre, se tiennent les housecarls, des guerriers professionnelles maniant la hache scandinave et sur les ailes, prennent place le fyrd, des paysans mal entrainés mais prêts à tout pour leur roi. La tactique est simple. Ce “mur de guerriers” doit rester en place et contenir les assauts des normands afin d’affaiblir.
Les normands sont quasiment aussi nombreux. Répartit sur trois fronts, les bretons à gauche, les normands au centre et le reste sur l’aile droite, ils alignent mille archers, près de quatre mille cinq cents fantassins et deux mille cinq cents chevaliers.
Le matin du 14 octobre 1066, vers 9h, commence la bataille d’Hastings. Dans un premier temps, les archers normands font pleuvoir des milliers de flèches sur les anglais. Malheureusement, sans grande réussite. Les fantassins sont alors envoyer contre ce “mur”, mais échoue dans leur tentative d’assaut. Alors, la cavalerie lourde charge pour percer ce rempart de boucliers. Les anglo-saxons ne bougent pas d’un pouce. Guillaume est alors au bord de la défaite.
Son aile gauche cède et se replie en désordre entrainant derrière elle une grande partie du flan droit des anglais pressés d’en finir. La panique touche alors le centre et les guerriers normands fuient à leur tour. La rumeur de la mort du duc amplifie la débandade. Guillaume, bien vivant se porte alors au devant des fuyards, se découvre, et les relance au combat. Profitant de cette panique, le Duc de Normandie réussi à prendre l’avantage. Il envoie sa cavalerie normande secourir les bretons et prend ainsi en tenaille l’aile droite anglo-saxonne. Les rescapés se replient et parviennent à regagner leurs position au sommet de la colline. Guillaume, va réutiliser cette ruse avec le flan gauche ennemi et réussir.
Dans l’après-midi, le Duc Guillaume décide d’adopter une nouvelle tactique. Il envoie ces archers au plus près de l’ennemi qui effectuent un tir tendu à l’horizontal. Les guerriers anglo-saxon ont de lourdes pertes et le roi Harold lui-même est blessé à l’oeil par une flèche. Par la suite, les cavaliers normands s’élancent, et lancent leur projectiles sans engager de corps à corps. En fin d’après-midi, le mur de bouclier se disloque. Guillaume décide de mettre fin à la bataille en attaquant directement le poste de commandement d’Harold. Il envoie un commando de quatre chevaliers qui perce la ligne ennemi et parvient au roi. Selon les chroniqueurs normands de l’époque, le premier chevalier atteint le roi par un trait passé au travers de son bouclier, le second lui coupe la tête, le troisième l’éventre et le dernier lui fend la cuisse. La nouvelle de la mort du roi Harold déclenche la fuite des restes de l’armée anglo-saxonne.
Guillaume le Conquérant est maître du royaume. Le roi usurpateur est mort dans la bataille, ainsi que ses frères et les plus importants seigneurs anglo-saxons. Sans opposition, le Duc de Normandie, Guillaume, sera couronné roi d’Angleterre le 25 décembre 1066 à Westminster.
La tapisserie de Mathilde
Aussi appelée Tapisserie de Bayeux, cette immense fresque raconte l’histoire de la conquête de l’Angleterre par les normands. De la décision d’Edouard, quand à son successeur, jusqu’à la victoire de Guillaume sur Harold.
C’est l’évêque de la ville de Bayeux, Odon de Conteville, demi-frère de Guillaume le Conquérant, qui eut l’idée de faire réaliser cette oeuvre. Après la prise de la couronne, le Duc de Normandie distribua les terres anglaises à ces seigneurs. Odon reçut le comté de Kent. C’est ici qu’il trouva les meilleurs ouvriers pour sa fresque. De belles dimensions, 70 m de long sur 0,5 m de large, sa conception pris certainement une dizaine d’années. Elle fut vraisemblablement exposée pour la première fois le 14 juillet 1077, dans la cathédrale de Bayeux.
La fresque est certainement inachevé. En effet, pourquoi ne pas l’avoir pas continué jusqu’au sacre de Guillaume le 25 décembre 1066. L’hypothèse est que Odon fut arrêté pour trahison en 1082, et sans commanditaire, l’oeuvre ne fut jamais terminée.